Cinq ans après être arrivée en Suisse, je parle le français, mais je ne le lis pas. Je suis redevenue une analphabète. Moi, qui savais lire à l’âge de quatre ans. Je connais les mots. Quand je les lis, je ne les reconnais pas. Les lettres ne correspondent à rien. « L’Analphabète » est un recueil de textes à caractère autobiographique, rédigés entre 1989 et 1990. Agota Kristof explique dans quelles circonstances elle a fui la Hongrie en 1956, à l’âge de vingt et un ans avec son mari et sa petite fille de quatre mois. Dans sa langue précise et ciselée, Agota Kristof nous révèle que le vrai drame dans son exil fut la perte de sa langue maternelle. Sans ses mots, elle a perdu son identité. Pour elle, apprendre à parler français fut une vraie lutte pour se reconstruire. Marquée par son histoire personnelle et par l’actualité plaçant le migrant au centre de l’histoire de notre siècle, Micha Herzog propose une adaptation scénique de « l’Analphabète », enrichie de quelques autres textes de l’auteure, sous le titre de « Cette langue que je n’ai pas choisie ». Très sensible aux enjeux identitaires étroitement liés à la langue, et à cette idée d’« exil linguistique » : le combat pour chaque mot, le tâtonnement jusqu’à la puissance salvatrice de l’écriture, voilà ce qu’elle souhaite amener sur scène. VIDÉO